AGLAVAINE ET SÉLYSETTE
Théâtre de la Colline
15 rue Malte-Brun
75020 PARIS.
01 44 62 52 52
Jusqu'au 6 juin 2014
à 20h30, sauf mardi 19h30 et dimanche 15h30
Un des préceptes de Bertold Brecht était que le théâtre devait instruire tout en divertissant. Ce spectacle ne fait ni l'un ni l'autre.
Pourtant la pièce de Maeterlinck développe une histoire passionnante : un jeune couple heureux accueille une belle-sœur. Entre les trois personnages va alors se créer une relation où l'amour est le centre, un amour idéalisé qui affranchit l'enfermement du couple pour irradier tout autour de lui et brûler les âmes, les cœurs et les chairs des trois protagonistes, sans barrière ni du sexe ni de la jalousie, un amour mystique qui a le pouvoir de créer de la beauté partout où il dévale. Un amour qui est aussi synonyme autant de joie que de souffrance, un amour surtout qui balaye pudeur et mensonge et qui ose exprimer tous les ravages et les ivresses que l'abandon à l'autre peut engendrer.
Il ne reste pas grand-chose de cette histoire sur le grand plateau de la Colline. Des décors pharaoniques qui écrasent sans servir à grand-chose sinon à donner prétexte à des noirs réguliers pour en faire jouer les machineries. Des acteurs à qui l'on a demandé une mécanique de diction qui n'épargne aucun « e » muet et sur-articule le moindre passé antérieur et semble s'étonner du premier plus-que-parfait du subjonctif venu. Des déplacements dans cet espace vide et muré qui ne débouche sur rien. C'est un théâtre à la mode qui a peur de chercher à rendre une émotion par peur d'être étiqueté de Pathos. Un théâtre pour qui le texte est tellement sacré, chargé de sens multiples et secrets, qu'on le donne à entendre avec autant d'intelligence que lors d'une première lecture à plat. Aucun risque.
Toute la partie visionnaire et humaniste de Maeterlinck échappe. Que les hommes et les femmes puissent briser l'intime de l'amour véritable pour en faire un banquet à partager à plusieurs sans distinction de sexe, de cela, on n'en verra rien. De cet espoir naïf et total, il ne reste rien.
Que dire d'autre, sinon que Manuel Vallade apparaît comme un dandy désabusé butant sur chaque conjugaison un peu fleurie, il est bien loin de l'être exalté par l'amour qu'il est censé interpréter. Bénédicte Cerutti construit une Aglavaine au naturel plus crédible. Judith Morisseau est une Sélysette juvénile, mais elle a l'étrange habitude de souligner chacune de ses phrases par d'amples mouvements des bras. Karen Rencurel dans le rôle de la grand-mère infirme, campe un joli personnage qui apparaît hélas très peu souvent.
Il manque beaucoup, à cette mise en scène de Célie Pauthe, pour passionner un public qui eut du mal à se motiver pour faire revenir les acteurs pour un deuxième salut.
Bruno Fougniès
Aglavaine et Sélysette
Texte de Maurice Maeterlinck
Mise en scène Célie Pauthe
Avec Bénédicte Cerutti, Judith Morisseau, Karen Rencurel, Manuel Vallade et en alternance Joséphine Callies et Lune Vidal
Collaboration artistique Denis Loubaton
Scénographie et costumes Marie La Rocca
Assistant à la scénographie Jean-Baptiste Bellon
Lumières François Fauvel
Son Aline Loustalot
Maquillages et coiffures Rose Edmonde Tacail