CABARET PICASSO – Le Bateau-Lavoir
Théâtre de Poche Montparnasse
75, boulevard du Montparnasse
75006 Paris
01 45 44 50 21
Jusqu’au 14 juillet 2016
les mardis, mercredis et jeudis à 20h30
Le théâtre de Poche à Montparnasse prend des allures de cabaret jusqu’à la mi-juillet. Cabaret Picasso évoque le Montmartre du tout début du XXe siècle, entre 1901 et 1914. Le spectacle fait revivre le célèbre peintre espagnol dans son atelier du Bateau-Lavoir, où l’on lavait la tristesse à grands coups de pinceau et de vin. Autour de lui gravitent tout un tas de personnages : sa maîtresse Fernande Olivier, Max Jacob, André Salmon, Guillaume Apollinaire, Maurice Utrillo, Suzanne Valadon, Matisse, Cézanne, Marie Laurencin, le Douanier Rousseau…
Avec toutes ces évocations, Reinhardt Wagner nous plonge dans une bulle artistique où les idées rayonnent. Le souvenir de la « Bande à Pablo » se veut musical avec les voix d’Héloïse Wagner et Emmanuelle Goizé, accompagnées par le piano de Reinhardt Wagner et l’accordéon de Rodrigue Fernandes (ou Jean-Claude Laudat, en alternance). Il est aussi poétique, grâce aux lectures de Jean-Jacques Beinex, vêtu d’une marinière, clin d’œil au peintre andalou. Les textes de Salmon, Apollinaire ou Jacob sont particulièrement bien choisis et résonnent parfois comme des aphorismes efficaces, sur la modernité éphémère de l’art, la réalité et l’illusion, entre autres.
Quant aux dix-huit chansons, elles sont écrites par le célèbre parolier Franck Thomas et leurs textes permettent aux deux chanteuses de livrer une large palette d’émotions. On envie la bohème de Picasso dans sa « case à peintre en planches », on sourit de la comparaison entre les artistes et les bourgeois, on s’émeut du sort de la Valadon « flanquée d’un fils qui boit ». Ainsi, se dessinent devant nos yeux de bien belles images et l’on est transporté dans des ambiances captivantes : Picasso en espadrilles dans les rues de Montmartre, les clowns de Medrano si chers à l’artiste, les lilas de la Closerie, la guitare espagnole… Le spectacle réussit le pari de distraire le public tout en peignant un portrait fidèle d’une époque bouillonnante interrompue par le conflit mondial, mentionné en fin de spectacle depuis la « Petite auto » d’Apollinaire : « Nous dîmes adieu à toute une époque/ Des géants furieux se dressaient sur l’Europe ».
L’harmonie sur scène est appréciable : la lecture dialogue avec le piano, les coups d’œil sont complices et l’on sent que les artistes prennent beaucoup de plaisir à nous faire voyager dans le temps. Et pour agrémenter le tout, on savoure ce spectacle autour d’un verre de vin : une agréable parenthèse.
Les deux autres spectacles du « Cabaret du Poche » évoquent les époques postérieures : Le bœuf sur le toit, les années Cocteau (vendredi et samedi à 20h30) et La voix humaine (lundi à 20h30).
Ivanne Galant
Cabaret Picasso, Le Bateau-Lavoir
Création musicale de et avec Reinhardt Wagner
Lecture : Jean-Jacques Beineix
Chanteuses : Héloïse Wagner et Emmanuelle Goizé
Accordéon : Rodrigue Fernandes et Jean-Claude Laudat (en alternance)
Piano : Reinhardt Wagner
Texte des chansons : Frank Thomas
Poèmes : André Salmon, Guillaume Apollinaire, Max Jacob
Mise en scène : Manon Elezaar
Mis en ligne le 1er juin 2016