LA FEMME TIROIR
Espace Gaelem
15 rue de Crussol
75011 Paris
Tous les lundis à 20h30 jusqu’au 27 février
Nous avions eu la chance il y a quelques temps de découvrir Gaële et un nouveau lieu artistique l’ Espace Gaële'M
Plaisir de le découvrir « habité ». Et par un spectacle étonnant, tout à fait en accord avec les murs, celui de Wedia, artiste pluridisciplinaire qui donne ici la preuve de ses multiples talents, récompensés par de nombreux prix (Prix de l'œuvre théâtrale revue Souffles, Prix Gaston Baissette, Prix Éclat du texte court, Élu coup de cœur des libraires et des bibliothécaires). Un spectacle hors des sentiers battus qui mêle habilement théâtre, musique et danse.
Le titre, qui évoque immanquablement le tableau de Dali, « La Femme commode » va ouvrir ainsi comme des tiroirs dévoilant peu à peu leur contenu, quatre périodes de la vie d’une femme qu’on devine très jeune.
Chacune représente une saison, automne, hiver, printemps, été. Quatre moments clés, ceux après lesquels on n’est plus vraiment la même.
Elle y a ajouté un autre recueil de nouvelles, « In Hôtel Rooms » où la jeune femme devenue adulte nous emmène successivement dans huit chambres.
Des instantanés qui nous questionnent. Tous.
« Qui est qui ? Qui es-tu ? Qui suis-je ? Je ne suis que funambule »
Et c’est bien en funambule, toujours sur le fil, qu’elle se raconte, qu’elle nous raconte, car on est avec elle, on est elle quand elle nous parle de l’enfance, de la liberté, de l’amour. Fouiller au creux des souvenirs, de l’intime. S’accepter. Comme on est. Vibrations. Rires. Murmures. Cris. Sanglots.
Seule en scène. Mais pas vraiment. Car elle dialogue avec la bande son, les deux voix, celle en direct et celle enregistrée se répondent, se font écho, parfois se superposent. Accompagnées de temps à autre de musiques soigneusement choisies. Voix qui chuchote, susurre, puis éclate soudain. Qui nous dit la peur, le désir, les espoirs, les désillusions, la colère. Une vie quoi.
Et puis le décor. Complètement à l’image de ce qu’a imaginé l’auteur. Épuré. Blanc. Un rideau immaculé pour les vidéos. Vidéo qui lui permettra de jouer avec elle-même. Et, superbe et fascinante réalisation de Janique Bourget, deux triangles de papiers superposés, blancs également, qui vont prendre vie, s’épanouir soudain, se déployer en corolle, avec lesquels Wédia, vêtue d’une simple chemise blanche dévoilant ses jambes magnifiques, joue avec élégance et sensualité. Gestuelle parfaitement maîtrisée mais cependant toute en grâce et légèreté.
Et nous à l’écoute. Captivés. Dans un silence quasi religieux. Frappés par les mots qui nous happent pour mieux nous dire ce qu’est une femme, ce que c’est qu’être femme et, tout en demi-teinte, à petits coups furtifs, rappeler les combats qu’on croyait gagnés mais aux victoires bien fragiles.
Nicole Bourbon
La Femme Tiroir
Auteur, interprète et Metteur en scène : Wedia
Décors Janique Bourget
Vidéo Margaux Rodrigues et Maxime Breteau
Mis en ligne le 29 novembre 2016