JEANNE
Espace Curial
Rue Colette Magny
75019 Paris
le 6 avril à 20h00
Galerie de portrait est une expression éculée mais c’est pourtant ce que Safia Mimoun réalise dans son premier seule en scène. Un spectacle qui est le fruit d’une alchimie complexe entre one-woman-show, monologue et enquête policière. C’est surtout un texte très écrit, articulé sur une construction dramatique précise et s’amusant à ricocher entre personnages fictifs et personnages médiatiques, entre créations de caractères originaux et caricatures humoristiques.
Quand la tendance dans les spectacles comiques est aux déballages autobiographiques, Zoubida, le personnage principal de Jeanne, est elle un personnage inventé, fictionnel, romanesque. C’est elle que l’on va suivre pendant un peu plus d’une heure dans sa quête qui ressemble plutôt à une enquête policière loufoque. Et pourtant, une recherche de ses origines, de son identité.
Pourtant, au début de l’histoire, Zoubida est une jeune femme de 35 ans tout à fait normale, banale. Une provinciale qui débarque à Paris, venant de ses Vosges natales, pour y tenter sa chance dans la chanson. Elle est là pour y être révélée, mais c’est elle qui va subir une révélation le jour où, auditionnant dans un club pour y chanter des chants populaires vosgiens, on lui conseille de tenter plutôt un répertoire arabe, au vu de son physique.
Sous ces dehors de farce, Safia Mimoun s’amuse à faire parler cette intime blessure que de n’être pas reconnu pour qui l’on est. Elle effleure avec provocation et dérision la perte tragique de son identité. Voilà Zoubida, vosgienne convaincue depuis sa plus tendre enfance, devenue errante à la recherche de ses origines arabes.
S’ensuit une véritable course poursuite à travers la France et la rencontre de personnages fantasques et démesurés pour lesquels la comédienne se grime, se déguise, se transforme. Sa force est cette hyper expressivité et cette énergie constante qui lui permettent de faire croire tout ce qu’elle veut. Aussi baroques, aussi barrés que soient ses inventions, on y croit, on en rit et on en est même souvent touché par cet humour doux amer.
Comme il est écrit avec gouaille dans le dossier de présentation : « …être arabe est parfois difficile même s’il existe quelques côtés réjouissants. »
Bruno Fougniès
Jeanne
Texte et jeu : Safia Mimoun
Mise en scène : Philippe Ferran
Mis en ligne le 19 février 2018
Mis à jour le 26 mars 2019