Alexandre BRASSEUR
Théâtre Rive gauche
6 rue de la Gaîté
75014 – PARIS
01 43 35 32 31
18h30, Alexandre est déjà au théâtre Rive Gauche où il joue à 21h le personnage du Docteur Galopin dans Georges et Georges.
C’est un rôle que lui a proposé Steve Suissa alors qu’il l’appelait pour lui parler d’un projet qu’il désirait soumettre à Éric-Emmanuel Schmitt.
« Il m’a demandé si j’étais libre à la rentrée, c’était le cas, il m’a envoyé le texte qui m’a beaucoup fait rire. J’ai dit oui, sans savoir qui était l’auteur. Et je n’ai toujours pas parlé de mon projet à Éric Emmanuel Schmitt ! »
Là, il découvre la façon de travailler de Steve Suissa
« Il vient du cinéma et est très intéressé par la sincérité. C’est pourquoi même si dans la pièce il utilise tous les codes du boulevard portés à l’extrême, il n’y a pas de sur jeu. Il sait exactement ce qu’il veut. Et ce qu’il ne veut pas. Il t’envoie quelque part et après, c’est à toi de fournir, c’est assez déroutant. Tu construis ton personnage au fil de tes réflexions personnelles mais il te remet vite dans le chemin si tu t’éloignes. Il ne m’a pas lâché ! J’étais troublé, je ne savais plus. Il faut travailler, réfléchir, trouver les failles du personnage comme le dit Éric Emmanuel qui connaît la trajectoire de ses personnages, qui sait le pourquoi du comment. C’est un drame inversé nous a-t-il dit, les failles sont les leviers de l’âme. Travailler sur les soucis des personnages c’est constructif. C’est une pièce troublante, on ne sait jamais si on est dans la réalité »
Rieur, l’œil malicieux, l’air solide, s’il a indéniablement le physique « Brasseur », avec cette voix au timbre si reconnaissable, il possède aussi le côté franc du collier qu’on prêtait déjà à ses père et grand-père, Claude et Pierre.
Et il est des sujets sur lesquels il ne faut pas trop le chatouiller. Les racontars sur son grand-père par exemple, qu’il regrette tant de ne pas avoir connu :
« Certains disent le connaître, ils ont passé une soirée avec lui et se croient amis. Et racontent n’importe quoi, le ramenant à peu de choses, un homme et une bouteille. C’est insupportable Ils méritent deux baffes. »
Autre chose qui l’agace profondément, l’expression « fils de » à laquelle il préfère celle « d’enfant de la roulotte. »
« Les médias en font leurs choux gras, ce sont des cons. Il y a des générations de médecins, d’enseignants, de machinos, ça n’étonne personne. De toutes façons, un nom ne suffit pas. S’il n’y a rien derrière ça tient pas la route. Ça me gonfle tout ça, moi, l’ai 43 balais et déjà 20 ans de carrière. Et ça représente beaucoup de travail. J’ai joué une fois avec mon père, dans « Mon père avait raison », de Guitry, une pièce écrite spécialement pour un père et son fils. On ne peut trouver mieux, donc pas question de renouveler l’expérience, même si ça été extraordinaire, un moment magique, incroyable. Mais pourquoi courir après le bonheur passé ? Je préfère le bonheur présent.»
Et le bonheur présent, c’est peut-être bien la demi-heure qu’ils passent ensemble dans sa loge avant qu’ils entrent en scène puisque Claude Brasseur joue à proximité.
Issu d’une famille d’artiste depuis 1820, il n’a pas vraiment décidé de continuer la lignée.
« Ça s’est fait naturellement, j’ai bénéficié de ce que j’appelle l’éducation silencieuse, c’est ce qu’on ne dit pas mais ce qu’on voit, ce qu’on ressent. J’ai toujours connu mon père certes travailleur, consciencieux mais en même temps tellement heureux, épanoui. C’est ce que j’appelle un art de vivre. Après, plus tardivement, m’est venu le goût des textes, la beauté de la langue française et le plaisir de la partager. Et puis je suis curieux, j’aime aller vers les autres, découvrir des univers. C’est un métier qui permet de belles rencontres humaines.»
Il a lui-même deux enfants, encore très jeunes, 14 et 16 ans.
« Je ne leur impose rien, ce que je veux c’est qu’ils réussissent dans ce qu’ils auront choisi, qu’ils soient heureux. »
Mais comme ils ont certainement bénéficié eux aussi d’une belle éducation silencieuse, on aura peut-être dans quelques années le plaisir d’applaudir la huitième génération de Brasseur. Qui sait ce que réserve l’avenir ?
Nicole Bourbon