Théâtre des Champs-Élysées
15 avenue Montaigne
75008 - Paris
Du 21 décembre au 8 janvier 2013, 20 heures, les dimanches à 17 heures.
Flamenco
« On dit que La Pepa n'est pas seulement un symbole, c'est un sentiment, une attitude, une manière de vivre, une forme d'être, un trait de caractère, un espoir [...]
On dit que notre Pepa c'est la voix du peuple sous l'apparence d'une femme qui aspire à la liberté ». Sara Baras
Le rideau monumental du Théâtre des Champs-Elysées se lève sur des corps jonchant le sol dans une pénombre dramatique. On devine de part et d'autre les arches d'un pont de pierre, l'amorce d'une ville. C'est Cadix encerclée par les armées de Napoléon pendant la guerre d'indépendance de 1808-1814.
La guerre, les morts, les survivants tout est noir et rouge. Les lumières, les costumes des danseurs, et aussi la voix du chanteur qui s'avance soudain vers le public et pousse une complainte solitaire comme un ténor sur une scène d'opéra.
Puis c'est le ballet des femmes toutes de noir vêtues et l'on comprend que chacune porte un deuil : un père, un mari, un frère tué dans les combats. Toutes ont un foulard rouge au poignet comme un ruisseau de sang auquel elles sont à jamais liées.
Alors apparaît la Pepa, incarnée par Sara Baras, elle aussi cachée sous un manteau couleur de deuil. Lorsque son manteau tombe au sol, c'est dans une longue robe rouge décolletée aux épaules qu'elle se révèle, rouge comme la vie pure qui tournoie, crépite et donne un souffle nouveau au peuple qui l'entoure. Alors toute la scène se met à baigner dans une lumière bleue comme la mer, comme le ciel, comme l'espoir de liberté.
Le flamenco, le chant, la musique d'inspiration gitane et flamenca vont nous raconter une page de l'histoire de l'Espagne et plus particulièrement celle de Cadix, ville portuaire ouverte sur l'Inde, le Moyen-Orient et l'Amérique du sud au temps des grandes révolutions européennes du début du XIXème siècle.
La Pepa est le surnom donnée à la première constitution espagnole promulguée en 1812 par le parlement de Cadix, formé de 300 députés (dont 60 issus des territoires d'Amérique centrale et du Sud). Tandis que sur le pont Zuazo de l'Île de León, unique accès terrestre et frontière de l'Espagne libre, la défense maintient l'armée française à distance durant deux ans et demi.
Le flamenco tel que Sara Baras le pratique et le réinvente, avec sa puissance sensuelle, sa violence rythmique et la bravoure physique qu'il exige d'elle et de ses partenaires, explose de vérité et de force pour raconter cette histoire de sang, de combat, de douleur et de libération finale. Les incroyables « zapateados » (crépitements des talons) et les merveilleux « braceos » (jeux de bras qui rappellent la grâce et la pudeur des danses hindoues) rendent encore
plus troublants les mouvements charnels et jeux des tissus des longues robes plissées. Il y a une séduction presque constante dans ce flamenco : les femmes et les hommes se défient, se provoquent, s'attirent et se repoussent. Car c'est aussi cela la vie.
Huit tableaux défilent ainsi devant nous, mis en musique par deux guitaristes et deux percussionnistes d'exception et trois chanteurs capables d'arracher des frissons à une chaise, huit tableaux extrêmement vivants, rythmés par les tonnerres déclenchés par les talons des danseurs, rythmés aussi par un éclairage dynamique, huit tableaux où les chorégraphies, les déplacements, les changements de décors se font avec une précision au millimètre et à la seconde. Un travail
époustouflant.
Sara Baras est effectivement une rareté : son spectacle est d'une rigueur sans faille, la troupe dépense une énergie communicative, et elle, danseuse de flamenco virtuose, à la fois gracieuse, espiègle, violente et parfois presque animale tellement son corps semble posséder une source inépuisable de force, d'allégresse et de désir de vivre. De l'intensité pure.
Bruno Fougniès
La Pepa
Livret, direction, dramaturgie et chorégraphie : Sara Baras
Musique : Keko Baldomero
Conception des lumières : Oscar Marchena, J. Luis Alegre, Sara Baras
Scénographie : Ras Artesanos
Costumes : Torres-Cosano
Danseuse : Sara Baras
Artiste invité : José Serrano (Chorégraphe de ses solos)
Corps de ballet :
Carmen Camacho, Charo Pedraja, Christina Aldon, Isabel Ramírez, Macarena Rodríguez, María Jesús García, Natalia López, Tamara Macías, Alejandro Rodríguez, Daniel Saltares, David Martín, Manuel Ramírez, Raúl Fernández
Répétitrice : María Jesús García
Musiciens :
Directeur musical Keko Baldomero
Guitare : Keko Baldomero, Miguel Iglesias
Percussions : Antonio Suárez, Manuel Muñoz «Pájaro»
Chanteurs : Saul Quirós, Emilio Florido, Miguel Rosendo
Collaboration spéciale : Ara Malikian
Quatuor à cordes Aupaquartet
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