FOLK-S_Will you still love me tomorrow ?
Au Monfort Théâtre
106 rue Brancion
75015 PARIS
01 56 08 33 88
Jusqu'au 8 novembre à 21h00
Ce soir, direction Le Monfort, situé Porte de Vanves, en plein cœur du parc Georges Brassens au but revendiqué de « défendre des spectacles sensibles, singuliers, qui ne ressemblent à aucun autre, dans leur beauté comme dans leur fragilité. »
Arrivés rue Brancion, on traverse un espace arboré joliment éclairé de guirlandes lumineuses. On passe devant la Cabane, la petite salle et on arrive, après une terrasse végétale et un bar, à la grande salle en amphithéâtre très confortable avec ses sièges en velours bleu.
On prend place, le plateau est entièrement dans le noir, deux projecteurs éclairent violemment la salle, empêchant de distinguer quoi que ce soit.
Pendant que le public s'installe, on entend des bruits sourds, répétitifs, rythmés.
La salle s'éteint, sur le plateau apparaissent des formes humaines en short et tee-shirt, ce sont elles que l'on entend, elles frappent le sol en cadence.
Puis le mouvement s'accélère, les danseurs tapent leurs cuisses, leurs jambes leurs pieds toujours en rythme, parfois tournant, parfois levant très haut la jambe dans une danse folklorique que reconnaîtront facilement ceux qui sont allés en Bavière ou ayant vu des films s'y reportant. Il paraît que ça s'appelle le « Schuhplatter » et ça demande un véritable effort physique. Ce n'est pas étonnant, le travail du chorégraphe, Alessandre Sciarroni, étant basé avant tout sur la notion de performance.
Ce spectacle-là introduit aussi un travail sur la durée, ici c'est soit le spectateur soit le danseur qui sifflera la fin de la partie, chaque interprète pouvant quitter la scène quand il sent qu'il n'a plus rien à démontrer, chaque spectateur étant libre de partir quand il le souhaite.
« On joue tant qu'il y a ne serait-ce qu'une seule personne qui regarde, ou lorsque les six danseurs (cinq hommes une femme) auront décidé de quitter le plateau. »
Et les frappés continuent, sourds ou claquants selon le geste employé, mais toujours répétitifs, ça devient plus une expérience sensorielle qu'un spectacle, c'est lancinant, fascinant, envoûtant, éprouvant ; parfois, l'un d'entre eux se dirige vers un ordinateur et lance une musique, sans aucun rapport rythmique avec leurs mouvements. Une musique qui monte, gronde, s'amplifie par finir par un bruit de marée énorme qui engloutit et engourdit toutes nos perceptions.
C'est surprenant, étrange, curieux, épuisant.
Le silence revient. Puis tout recommence.
Les danseurs ne montrent aucune fatigue, ils continuent à sauter, tourner, frapper sans effort apparent, si ce n'est la sueur qui peu à peu trempe leurs maillots.
La salle est attentive, subjuguée, puis parfois s'agite, de ci de là un rire nerveux éclate.
Au bout d'environ une heure, un danseur quitte le plateau après s'être saisi d'un accordéon qu'il fait simplement souffler, accompagnant le rugissement des flots.
Puis un couple se lève et s'en va. Puis un autre. Puis une personne seule. Puis quelques petits groupes. Les spectateurs se regardent les uns les autres, partira, partira pas ?
Je ne sais combien de temps a duré le spectacle, je m'en suis allée au bout d'une heure et demie, la salle était encore bien pleine. Et les cinq danseurs continuaient toujours leurs mouvements cadencés, toujours sans essoufflement, sont-ils des extra-terrestres délivrés de nos pauvres soucis corporels ?
Dehors, la tête encore bruissante de sons, on est surpris dans la fraîcheur de la nuit par le calme du parc. On se sent lessivé, étonné, surpris, dérangé par ce à quoi on vient d'assister.
Nicole Bourbon
Folk-s_Will you still love me tomorrow ?
Concept, dramaturgie Alessandro Sciarroni
Avec : Marco D'Agostin, Pablo Esbert Lilienfeld, Francesca Foscarini, Matteo Ramponi, Alessandro Sciarroni, Francesco Vecchi
Musique originale Pablo Esbert Lilienfeld
Lumières Rocco Giansante
Technique lumières Cosimo Maggini
Costumes Ettore Lombardi
Mis en ligne le 6 novembre 2014