On se demandait bien tous un peu ce que devenait Jean Guidoni. D'abord chanteur de textes forts et dérangeants de Pierre Philippe dans les années 80, puis s'interprétant lui-même, il avait, ces dernières années rendu un hommage chanté (et enchanté) à Prévert. C'était il y a une paire d'années, comme on dit. Et puis le revoilà, toujours en pleine possession de ses moyens, s'enthousiasmant pour l'œuvre d'Allain Leprest. Allain Leprest, on le sait, nous a quittés, emportant avec lui nombre de chansons inécrites. Mais des inédits existaient et ce sont ces pépites, mises en musique par le fidèle Romain Didier, qui nous sont présentées ici.

Autant dire que c'est une heureuse idée : jamais avare de mots et de trouvailles, Leprest nous régale avec son talent habituel, talent de jongleur mais aussi de poète. La tentation du retour à l'enfance, les rêves qui peinent à se poser, le temps qui s'enfuit, autant de thèmes abordés avec cette petite musique si particulière de l'auteur de « Bilou ». Il ne craint pas d'évoquer les charters d'immigrés, ou bien les histoires d'amour difficiles. L'amour décape, l'amour dérape, lance-t-il dans « Quand est-ce que tu vas reviendre ? »

Et les chansons s'enchaînent. Certaines marquent plus que d'autres mais elles sont interprétées avec un talent égal par Guidoni. Dans un écrin de lumières, épaulé par quatre musiciens, le chanteur déploie son talent précis et fantasque. Il est tout autant comédien que le danseur qu'il s'amuse parfois à être. Ses chansons sont chorégraphiées et il bouge toujours bien. Il chante certaines chansons que Leprest avait interprétées, comme « Où vont les chevaux quand ils dorment ». Il reprend aussi, et personne ne songerait à s'en plaindre, quelques morceaux de son ancien répertoire à lui. Citons « Djemila », « Vérone-véronal » ou bien une chanson de ses début, le très prenant « Y'a un climat ».

Dans cette salle mythique du Théâtre de la Ville, Guidoni avait déjà chanté en 1989 et 1993 puis aux Abbesses en 2009. Mais l'aventure continue et une tournée prolonge cette halte parisienne.

À suivre, donc, que l'on soit fan de Leprest, de Guidoni…ou bien des deux.

Gérard Noël

Jean Guidoni – Paris Milan

Textes : Allain Leprest.
Musiques : Romain Didier.
Mise en scène : Gérard Morel.

Avec  Jean Guidoni (chant)Philippe Drevet (contrebasse), Thierry Garcia (guitares) Didier Guazzo (percussions) et Julien Lallier (piano)

Lumières : James Angot.
Son : Julien Parent.