CERCLE MIROIR TRANSFORMATION

Théâtre du Centre
13 rue Louis Pasteur
84 000 Avignon

Du 4 au 26 juillet à 17h30

Festival d’Avignon Off

 

Cuts. Manière cinéma. Des courtes scènes, à peine quelques phrases parfois, entrecoupées de noirs plus ou moins brefs. Toute l’histoire se déroule dans une même pièce. C’est un stage. Une sorte d’atelier de théâtre interactif qui ressemble en réalité à un coaching de développement personnel.

En jeu, quatre participants d’horizons divers, d’âges divers. Une lycéenne de seize ans, un ébéniste de quarante, un prof de soixante (mari de Marty, celle qui dirige l’aventure) et une actrice de vingt-cinq. Un panel varié. Une tranche taillée un peu au hasard dans le tissu de la société américaine middle class. On comprend vite que ces personnages se retrouvent chacun là pour des raisons personnelles qui tiennent au mal-être et à la difficulté de se réaliser ou de digérer les accidents de la vie. Entre le groupe de parole et la thérapie.

Cela se déroule sur six semaines. Des exercices différents à chaque scène. Des exercices tirés des méthodes de travail des acteurs adeptes de l’Actor Studio ou de Stanislawski. Des exercices que le monde de l’entreprise a depuis longtemps adoptés pour créer des synergies de groupes chez leurs employés. Des sortes de jeux, des jeux de rôles, mi-psychologiques, mi-introspectifs.

Ce sont des scènes pour la plupart drôles, souriantes, légères. Car d’emblée, les personnages sont plongés dans une situation artificielle, hors de leurs quotidiens, détachés de leurs comportements normaux. Tout est nouveau pour eux. Et tout comporte sa part de faux, de ludique.

En partant de ces jeux, ils vont tenter, grâce à ce stage, d’être eux-mêmes. Ce mi-chemin entre leur sincérité et leurs rêves.

L’autrice Annie Baker est une jeune dramaturge américaine récompensée par de nombreux prix dont le Pulitzer. Son regard sur l’Amérique actuelle possède une grande humanité : des gens simples, aux drames ordinaires, étranglés par leurs difficultés à vivre et surtout leurs difficultés à aimer. Un mal d’amour partagé comme une maladie commune, universelle. Car le centre irradiant de cette pièce est bien cette quête d’amour et cette incapacité à le vivre, à le créer. Voilà une vision acérée du tissu social américain bouillonnant de blessures individuelles. Une vision sociologique où la vision politique est malheureusement absente. On ressent plutôt un romantisme désespéré sous la plume précise et économe d’Annie Baker qui use de longs silences et de courtes phrases pour distiller ses pensées.

Pour faire exister ces personnages, Nick Millett les présente sous un éclairage hyperréaliste, mais teinté tout de même d’une certaine abstraction, une distance dramatique qui les éloigne du pathos et du documentaire. Un magnifique travail d’acteur et de création de personnages a été réalisé. Les cinq interprètes paraissent d’une vérité absolue. Le travail sur les corps, les tenues, les gestes est aussi parlant, et souvent plus porteur de sens et d’informations que les scènes dialoguées. Des non-dits extrêmement forts. Tout ceci provoque des élans d’empathie pour ces personnages simples et touchants aux prises avec leurs propres limites.

Un joli moment qui souffre un peu de la répétition un peu monotone des changements de scène, pour cette première représentation.

Bruno Fougniès

 

Cercle Miroir Transformation

Texte d’Annie Baker , traduit par Patricia Morejón et Nick Millett
Mise en scène Nick Millett
Assistante à la mise en scène Clara Normand
Costumes Julia Zanni

Avec : Basile Bernard De Bodt, Françoise Huguet, Lucy Millett, Patricia Morejon, Pierre-olivier Mornas

 

Mis en ligne le 24 juin 2015

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