LA MARÉCHALE ET LE LIBERTIN

Théâtre des Carmes
6, place des Carmes
84000 – Avignon

13h00

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Mis en ligne le 15 juillet 2014

La Maréchale et le Libertin

Quand la philosophie se fait plaisir le plaisir devient philosophie.

Magnifiquement revisitée par Alain Guyard, philosophe et dramaturge, l'œuvre initiale de Diderot acquiert ici un relief aussi époustouflant qu'inattendu.

Pour un entretien urgent Diderot se rend chez le Maréchal de… Mais ce dernier est absent. Dans l'attente de son retour la Maréchale de…, en bonne épouse dévote, accueille le philosophe (non sans arrières pensées) et entame une conversation sur les bienfaits de la religion.

À cet instant Diderot, très à l'aise sur le terrain de la pensée, estime qu'il remportera sur son interlocutrice une victoire presque trop facile.

Les arguments échangés sont denses, percutants, et témoignent d'une vivacité d'esprit surprenante de la part de la Maréchale. Les deux adversaires sont coriaces et la dispute intellectuelle va crescendo .

Au fil du temps, telle une araignée qui tisse sa toile, la jeune femme pousse le philosophe dans ses ultimes retranchements jusqu'à ce que tout bascule. Là, nous découvrons un Diderot totalement désappointé voire même déstabilisé.

Dans ce duel où toutes les certitudes volent en éclat, comment ne pas s'interroger :   quel est, de ces  deux protagonistes, le plus lucide sur le rôle qu'il joue dans le monde et la réalité de ce monde ?

Telle une ombre mystérieuse et inquiétante, un troisième personnage vêtu de noir envahit l'espace. Elle représente la pensée incarnée de la Maréchale, elle est l'amour, elle est la mort. Elle est le sexe de l'ombre à l'inverse d'un Diderot tout en lumière.

Un rôle primordial est dévolu à la scénographie qui est particulièrement ingénieuse et  esthétique.

Sur la scène, un sol en damier noir et blanc laisse présager la partie d'échecs. Meubles stylisés, costumes louis  XV, lumières de fin de journée d'été, musiques de Rameau et Mozart évoquent un XVIIIème siècle raffiné. A chaque changement, l'axe du décor est modifié  comme au cinéma, ce qui conduit le spectateur à  changer de « point de vue » (au sens littéral du terme).

L'élégance générale du plateau rappelle que cette dispute philosophique se déroule entre personnes  issues de l'élite intellectuelle.

Mais ô surprise… l'époque change, le masque tombe : le propos d'alors se révèle être un prétexte pour s'adresser au simple citoyen actuel, pour dénoncer les impostures de la vie politique d'aujourd'hui, les faux-semblants des grands idéaux et leurs institutions.

Un grand coup de chapeau à la mise en scène de François Bourcier qui ménage le suspens durant tout le spectacle.

Un grand bravo à l'auteur pour cette pièce qui fait sortir la philosophie dans la rue et la met à portée de chacun.

Cet excellent spectacle est magnifiquement interprété par Annick Gambotti, Émilie Génaédig et François Bourcier.

Précipitez-vous !

Nadim Adra

 

La Maréchale et le Libertin

Auteur : Alain Guyard d'après l'œuvre de Diderot
Compagnie Théorème de Planck
Mise en scène : François Bourcier

Avec : Annick Gambotti, François Bourcier, Émilie Génaédig

Lumières : Antonio De Carvalho
Costumes : Natasha Smet et Isabelle Chritin

 

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