NUIT D’IVRESSE

Théâtre de la Michodière
4 bis rue de la Michodière
75002 Paris
01 47 42 95 22

Jeudi, vendredi, samedi à 20 h 30
Matinées les samedis à 16 h 30
Matinées les dimanches à 15 h 30

 

Nuit d’ivresse loupe 

Quel plaisir d’assister à une telle réussite !

Pourtant c’était un sacré challenge à relever tant est ancré dans les mémoires La « Nuit d’Ivresse » avec l’incroyable Josiane Balasko, aussi bien au théâtre en 1985 aux côtés de Michel Blanc qu’au cinéma en 1986 avec comme partenaire cette fois Thierry Lhermitte.

Il est vrai que c’est elle-même qui s’est attelée à cette réécriture et on retrouve avec plaisir sa plume mordante, emplie d’humour en même temps que d’humanité.

L’idée ici est de remplacer la jeune femme par un jeune homosexuel.

Les pièges étaient nombreux notamment de tomber dans la caricature du personnage style « La Cage aux folles ».

Ce n’est en aucune façon le cas ici et Thierry Lopez campe avec beaucoup de sensibilité son personnage gay.

Car, et c’est bien le paradoxe de cette histoire, le thème est à priori assez sombre avec ses trois personnages, trois paumés, que le hasard fait se rencontrer dans un bar. Mais le fait est qu’on rit beaucoup grâce à des répliques à l’emporte-pièce et des numéros d’acteurs époustouflants Et qu’on est aussi certaines fois très émus quand l’interprétation d’un coup devient plus intériorisée et que tout passe dans les regards.

J’ai déjà dit tout le bien que je pense de Thierry Lopez que je suis avec intérêt depuis ses débuts et dont le talent s’affirme de rôle en rôle. Il donne à son personnage un dynamisme d’enfer doublé d’une superbe élégance et d’une émotion sincère. Je pense vraiment qu’on a là celui qui va devenir, la maturité aidant, un de nos plus grands comédiens, du niveau d’un Serrault, capable de jouer aussi bien du comique que du dramatique.

On ne présente plus Jean-Luc Reichmann que dame Télé a rendu célèbre. Ce rôle d’animateur lui va comme un gant et il n’hésite pas à s’en moquer, à montrer l’envers du décor, mais en finesse, sans en faire trop. Car l’homme est aussi comédien, ce furent d’ailleurs ses débuts, et si on le retrouve dans un feuilleton toujours à la télé, on avait déjà pu l’applaudir au théâtre dans Hibernatus entre autres. Il fait ici merveille tour à tour cynique, arrogant, imbuvable, puis stupéfait, effondré, malheureux. Une palette de sentiments dont il se joue avec aisance et crédibilité.

Le troisième personnage est moins présent et c’est dommage tant il est joué avec une truculence jouissive par Stéphane Boucher, une gueule de cinéma qui retrouve parfois les planches et se permet même le luxe de deux seul en scène « Confiance » et « Stéphane Boucher se vide la tête ».

Son personnage de barman est inénarrable et le succès tient certainement à la grande cohérence d’interprétation, les trois étant du même niveau et visiblement heureux d’être ensemble en scène.

Ajoutons une excellente homogénéité des décors, superbes, des costumes qui soulignent les caractères des personnages sans exagération, d’une mise en scène endiablée où les scènes s’enchaînent sans nous laisser le temps de souffler, et des musiques bien choisies en particulier l’excellente idée, à la fois drôle et émouvante, au moment des saluts.

Bref, deux heures qu’on ne voit pas passer, le bouche à oreille fonctionne déjà car hier après trois semaines d’exploitation, la salle était archipleine, d’un public ravi qui n’a pas ménagé ses applaudissements.

Nicole Bourbon

 

Nuit d’ivresse

Une comédie de Josiane Balasko
Mise en scène de Nathalie Lecoultre
Assistante mise en scène : Marjolaine Aïzpiri

Avec : Jean-Luc Reichmann, Thierry Lopez, Stéphane Boucher

Décor : Stéphanie Jarre
Costumes : Laurent Dejardin
Lumières : Laurent Béal
Musique : François Peyrony

 

Mis en ligne le 17 février 2018