LA FOULE, ELLE RIT

Théâtre de l'Epée de Bois
La Cartoucherie
Route du Champ de Manœuvre
75012 PARIS
Jusqu'au 16 juin à 19h Le 17 juin à 16h
01 48 08 39 74


Photo: Benoît Fortrye

La pièce fait partie d'un cycle de quatre spectacles donnés au théâtre de l'Epée de Bois jusqu'au 24 juin.

Jean-Pierre Cannet, auteur invité, est sensible au thème du danger couru par les personnages. Il rend compte de la situation des réfugiés, clandestins et autres, en quête d'un Eldorado, … anglais en l'occurrence. Quand on aura ajouté qu'il s'agit d'un spectacle « pour enfants », également basé sur le clown, on mesurera à quel point l'enjeu est fort. Peut-être un peu trop, d'ailleurs : il y a comme une dichotomie entre tous les éléments de jeu et de spectacle et le texte de Cannet. Disons qu'un peu moins de « littérature » aurait été souhaitable. Quand Zou, le personnage principal, entre en clown, on y croit. Il fait jaillir un univers foutraque, à la fois drôle et touchant. On s'attache à lui, on aurait envie de se laisser embarquer. Et puis voilà qu'il se met à parler, avec les mots de l'auteur, mots bien écrits, là n'est pas la question, mais auxquels il est difficile d'ajouter quoi que ce soit. Le metteur en scène Alain Batis se serait-il laissé piéger ? Il déploie un art véritable dans la direction d'acteur, dans l'agencement des scènes, alliant mouvement et monologues. Le travail de scénographie est imaginatif et efficace, les lumières également. Rien à redire sur la musique.

Zou, le personnage enfant, se dédouble voire se détriple : il est à la fois derrière le nez rouge du personnage principal. Parfois, il enlève ce nez et apparaît, ce qui est intéressant, avec son vrai visage et ses nippes habituelles. Il est aussi une marionnette à laquelle parle sa mère (autre marionnette). Elle l'encourage, le console. Après avoir été celui qui fait rire, sur un bateau en partance pour l'Angleterre, il finira par réaliser son rêve, devenir un vrai clown dans un vrai cirque.

Au passage, on aura eu droit à une tempête (joli effet de draps) on aura connu les quais d'un port et sa grue, et parcouru un tunnel sous la manche. Tout ceci, encore une fois, fonctionne. Et plutôt bien. Il y a, de même, des trouvailles dans le texte : « Le Français, blanc et tendre, comme le pain » ou bien « Le dimanche matin, tout est désert : c'est le chaînon manquant dans l'échelle du temps » ou encore « Les pompes immenses du clown, c'est pour écraser la morosité ». Sans oublier bien sûr, ce leit-motiv : « C'est souvent le dernier qui parle qui a raison ».

Dans le rôle de Zou, Raphaël Almosni est remarquable. On pourrait le regarder des heures. D'ailleurs, il nous captive, quoi qu'il fasse. Dans « Yaacobi et Liendental » il donnait à apprécier d'autres facettes de son jeu. Il a une façon à lui de bouger, de sourire, de regarder sa valise d'un air de chien battu, qui sauve le spectacle. C'est un excellent comédien, … et un vrai clown.

Pour partager la vie des clandestins, réfléchir sur le sort du « petit dernier » d'une fratrie, pour voyager, pour rire, parfois, on peut aller voir « La foule, elle rit ».

 

Gérard NOEL


Photo: Benoît Fortrye

La foule, elle rit

Mise en scène : Alain Batis.

Avec Raphaël Almosni, Thierry Desvignes, Alexandra Malcouronne.
Scénographie : Sandrine lamblin.
Lumières : Jean-Louis Martineau.
Costumes : Jean-Bernard Scotto.
Création musicale : David Kpossou.
Régie lumières : Nicolas Gros.
Régie son : Emilie Tramier.