FIN DE SÉRIE

Vingtième Théâtre
7, rue des Plâtrières
75020 Paris
Tel: 01 48 65 97 90

Jusqu'au 13 octobre
du mercredi au samedi à 21h30, le dimanche à 17h30

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Mis en ligne le 7 septembre 2013

Fin de série

Ce pourrait être une tragédie classique : unité de temps, unité de lieu, unité d'action : une journée, un appartement, le quotidien d'un couple de retraités. Un thème peu propice à la rigolade : la vieillesse et ce qu'elle peut comporter de cruautés, de mesquineries, de mal-être.

Eh bien figurez-vous que l'on rit beaucoup de cette fin de série, clin d'œil évident à Beckett et à sa Fin de partie.

Car le sujet est traité à la Tati et sans pratiquement de texte. Comme quoi des gestes étudiés et exécutés au millimètre, des regards lourds de sens, des attitudes savamment travaillées peuvent valoir bien des paroles.

Ce couple qui se retrouve face à lui-même évolue dans un décor sans âme, très daté : vieux fauteuil, table et buffet années 50, lampadaires.

Sans oublier le chat (faux, dans sa corbeille), l'oiseau (faux, dans sa cage), le poisson (faux dans son aquarium) et au mur, le coucou et son tic-tac, « qui dit oui, qui dit non et puis qui les attend », le tout accompagné d'une bande son avec bruitages divers très élaborée.

Et l'on rit, tellement c'est croqué avec une tendre méchanceté, tellement ça déborde de gags hilarants, tellement ça regorge de trouvailles toutes plus folles les unes que les autres.

Et puis il y a les interprètes. Fabuleux. Impayables. Maîtrisant à la perfection l'art du mime, du clown, du geste. C'est net, précis, quasi chirurgical. Des mouvements qui sont des dialogues. Des échanges de regards ou au contraire des évitements qui sont autant de répliques assassines.

Zazie Delem, robe de chambre avachie, ceinture nouée de travers, petit chignon soigneusement tiré, mène la danse, ne laissant aucun répit à son compagnon, jamais à court de vacheries, l'obligeant cent fois à changer une ampoule qu'elle dévisse subrepticement, jouant sadiquement des interférences du micro-ondes avec le pace maker de son mari qui du coup s'agite comme un perdu, comme électrisé, mais qui parfois amorce un geste tendre, souvenir de l'amour qui les unit, au passé et encore au présent malgré tout.

Alan Boone est le troisième larron, tour à tour médecin, kiné, commercial en objets sensés améliorer le quotidien des vieux ou encore représentant des pompes funèbres, dans des scènes réjouissantes d'un incroyable cynisme qu'il traite avec une élégance et une maestria époustouflantes.

Jean-Claude Cotillard enfin est le vieux, le maître d'œuvre de ce spectacle qu'il a conçu et mis en scène, et où il donne toute la mesure d'un talent qu'on avait déjà pu apprécier de nombreuses fois dans ses précédents opus.

Voilà un spectacle déroutant, original, d'une cruauté caustique et tendre, d'une méchanceté attendrissante, un petit bijou à l'humour ravageur à ne pas manquer.

Nicole Bourbon

 

Fin de série

Création Cotillard Compagnie
Mise en scène : Jean-Claude Cotillard

Avec : Alan Boone, Jean-Claude Cotillard et Zazie Delem.

Décors : Charlotte Smoos & Monsieur QQ
Costumes : Agathe Laemmel
Lumières : Julien Dubuc
Régie et son : Franck Combe
Audiovisuel : Guillaume Cotillard

 

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