BELLE DU SEIGNEUR (extraits)

Cartoucherie de Vincennes
Théâtre de la tempête
Route du Champ de Manœuvre
75012 PARIS
01 43 28 36 36
Du 15 novembre au 16 décembre 2012. du mardi au samedi à 19h45 et le dimanche à 15h30.

On aurait presque pu écrire « Belle (trempée) du Seigneur », puisque l'idée force de la mise en scène est d'immerger la comédienne dans une baignoire pendant toute la durée du spectacle. Elle en sort, y retourne, monte sur les rebords de la baignoire, se replonge dans l'eau, … Au-delà de l'aspect anecdotique de la chose, disons que cette bonne idée est peut-être une fausse bonne idée. C'est grâce à la brièveté du spectacle (45 minutes) que cela tient, ou à peu près. Mais il arrive, en voyant ruisseler la malheureuse comédienne, de porter peine pour elle et de se demander si, des fois, elle n'aurait pas froid. Pensée parasite, certes, mais qui peut surgir.

Sans multiplier les références à la peinture, avouons que cette baignoire entourée de linges, éclatante dans un rond de lumière qui la magnifie, permet une belle image. La proximité de la scène ne nous laisse rien ignorer des plis du vêtement de la comédienne, du détail des gouttes qui parsèment son visage, ses bras. Il s'agit juste ici de sensualité, d'une approche quasiment picturale qui va bien avec le propos du texte, à savoir la découverte de l'amour physique avec un homme que ce personnage d'Ariane, idolâtre. C'est un curieux mélange, mélange de fausse naïveté et de rouerie que contient l'œuvre maîtresse d'Albert Cohen. Il est, visiblement, le destinataire de cet intérêt mais il ne lui déplaît pas de faire parler sa maîtresse, de montrer ses réticences, ses hésitations, puis de la faire se confier quand elle est vaincue, emportée, enivrée, comblée, …

De l'œuvre de Cohen, on n'a retenu ici que des extraits, des fragments. Pourquoi pas ? Si on passe à côté du contenu profond et des méandres du récit, on goûte tout du moins des moments. Des moments forts et variés, sans vraie continuité, bref un picorage dans le texte et celui-ci est suffisamment fort pour s'en relever. On l'a dit, la mise en scène de Jean-Claude Fall et Renaud Marie Blanc est minimaliste. Elle commence par une femme plongée dans l'eau et finit de même, ce qui peut se lire comme une émergence, une naissance, puis un retour au ventre originel. Voire une petite mort.

Sauvage ou suave, écarquillant les yeux ou jouant de son côté buté, Roxane Borgna éclate dans ce rôle qui semble taillé pour elle. Elle bouge bien, elle est la sensualité même.

En bref le spectacle donne envie de lire ou relire Albert Cohen et son formidable roman. Il nous prend par la main pour nous y emmener. On aimera certainement la balade.

 

Gérard NOEL

 

 

Belle du seigneur (extraits)

Mise en scène de Jean-Claude Fall et Renaud Marie Leblanc.

Avec Roxane Borgna

Décor, costumes et lumières : Equipe technique du Théâtre des Treize Vents
Collaboration à la scénographie : Gérard Didier. Régie : Gilles David, Yann Nedelec

 

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