BECAUSE THE NIGHT

Théâtre Les Déchargeurs
3 rue des Déchargeurs
75001 PARIS
À 21 h. du mardi au samedi. Du 5 janvier au 11 février 2012
Résa : 08 92 70 12 28              

 

Curieuse pièce que « Because the night » la première ou en tout cas une des premières pièces de Paolo Handel : à priori, elle traite des rapports amoureux. Elle nous présente un jeune couple qui vit ensemble depuis quatre ans environ. Ceci dans un décor succinct, un canapé gris, un portant avec des vêtements d’un côté et une pile impressionnante de journaux (Télérama, …) de l’autre. Deux portes qui permettent les entrées et sorties des personnages. Détail qui a son importance, puisque le fragile équilibre entre ces deux-là est vite rompu par le fait qu’elle rentre plus tard que prévu. C’est la première scène, dans le sens « dispute » du mot. Reproches, bouderie et agressivité à fleur de peau. Il sort à son tour, se braque quand elle lui demande ce qu’il a fait. Le ver, comme on dit, est dans le fruit et la faute en incombe visiblement à la partie masculine du couple.

Passons vite sur les légères réserves que nous pourrions émettre sur le début de la pièce : en effet, si le jeu des comédiens « passe », par contre, le style évoque les séries comme on en voit tant. Il y aurait comme une tendance à « faire des phrases ». À dire des mots parce qu’ils sont écrits et, parfois, trop écrits. On se dit que ce n’est ni nouveau ni drôle, on attend simplement la suite. Heureusement, cette impression disparaît peu à peu.

Durant cette pièce, courte, on n’est véritablement empoigné qu’après la premier quart d’heure, ce qui n’est pas si mal.  Quand un subtil glissement nous fait sentir que les réactions du garçon sont sans doute excessives. Quand ces monologues qui contredisent ce que l’on voit sur scène nous font dresser l’oreille ; Quand, enfin, l’enjeu apparaît, quand la tension va crescendo, …nous précipitant dans la crainte : que va-t-il arriver à la jeune fille victime de son conjoint ?

Ici les « Je n’ai pas les mots ! » ou « je voudrais avoir de l’importance à tes yeux ! » qu’elle prononce, font mouche. Quand il déclare « je ne veux pas mourir seul ! », qu’il fuit chaque amorce d’explication, ou qu’il réagit par la violence, tout ceci nous glace, parfois jusqu’au malaise. Ce qui est nécessaire. Chacun, chacune, sait que la violence conjugale existe, …et la mettre en scène mérite le respect. D’autant que le traitement s’avère juste et les deux interprètes, efficaces. Citons tout d’abord Marguerite Dabrin (elle) : toute jeune et naïve qui commence par « encaisser », puis reste hésitante, « Je ne sais plus me battre, dit-elle, car il m’a enseigné la défaite. » Elle décide enfin de prendre la mesure qui s’impose : l’affronter, lui. Lui, c’est l’auteur, Paolo Handel qui (ce n’était pas facile) endosse le rôle de ce jaloux pathologique, cet homme qui voudrait une femme soumise et muette. Ce « salaud » comme hélas il en existe.    

Côté mise en scène et scénographie, c’est Pierre-Etienne Royer qui est aux manettes : on pourrait déplorer que le rythme ne soit pas un peu plus lent, au début, le temps de laisser filtrer l’incompréhension, l’incommunicabilité. Cela dit, reconnaissons à son travail sobriété, et bonne maîtrise des moments de tension.

Un sujet fort, un jeune auteur, des comédiens prometteurs, …autant de raisons d’y aller.

 

Gérard NOEL

 

 

Because The Night

Auteur : Paolo Handel
Artistes : Paolo Handel, Marguerite Dabrin
Metteur en scène : Pierre-Etienne Royer